26 Octobre 2018
Ils intriguent, fascinent ou font peur, les cimetières ne laissent personne indifférent. Certains sont même beaux dans leur genre et peuvent faire naître des sentiments toujours un peu tristes et proches de la nostalgie. D'autres font immédiatement frissonner provocant chez certaines personnes un mal-être, un sourde angoisse voire de la peur.
Ce sont dans ces deux genres de cimetières où je vous propose de vous emmener cette-fois.
Le premier cimetière n'est pas très connu bien que cela soit le plus vieux cimetière d'Albi toujours visible.
Par une ordonnance royale de Louis XVI, il est interdit à partir du 10 mars 1776 d’inhumer dans une église toute personne hormis les ecclésiastiques, prêtres, évêques ou les fondateurs de l'église, de la chapelle ou de l'oratoire en question.
Il est même conseillé d'établir désormais les cimetières en dehors de la ville et non plus contre l'église paroissiale.
En 1772, la mairie d'Albi achète à l'évêché d'Albi, ce terrain contre l'Hospital Général d'Alby qui fait face à la cathédrale Sainte Cécile.
En 1827, la mairie créée un nouveau cimetière, plus vaste, le cimetière des Planques et abandonne à l'hôpital le "cementèri vièlh" .
L'accès n'est pas vraiment visible, telle une protection supplémentaire pour garantir une relative tranquillité aux défunts qui y reposent.
Les ifs et les cyprès forment une voûte au dessus des tombes ce qui vient ajouter au charme et qui elle aussi semble vouloir protéger toutes ces sépultures.
L'ambiance est pour moi à la fois douce et mélancolique. Tant de grands noms albigeois reposent ici à jamais.
Des plus humbles aux plus célèbres les pierres tombales érodées par le temps nous révèlent souvent très discrètement le nom des hommes et des femmes qu'elles protègent depuis de multiples décennies.
Parmi les 279 tombes du cimetière, 530 défunts ont été recensés.
Les tombes les plus discrètes, sont celles des Petites Sœurs de la Charité de Saint Vincent de Paul qui reposent entre deux archevêques d'Albi.
Monseigneur Brault, Baron d'Empire et Pair de France, devenu pratiquement aveugle, mort à plus de 80 ans, le 25 février 1833 à 3h du matin.
Monseigneur de Gualy, né à Millau en 1786 et mort à 55 ans le 16 juin 1842.
16 maires ont été inhumés là. La Ville d'Albi les a honorés il y a quelques temps.
Parmi les personnalités albigeoises des plus notables, on trouve l'architecte et urbaniste Jean-François Mariès qui sauva en 1792 la cathédrale d'Albi des affres destructrices des révolutionnaires.
Il écrivit au Ministre de l'Intérieur et des Cultes Jean-Marie Roland de la Platière.
Ce faisant, le Jubé et toute la clôture du Chœur de la cathédrale furent sauvés en étant inscrits comme "Biens Nationaux", malgré la demande de leur destruction par l'évêque constitutionnel d'Albi Mgr Gausserand.
Durant la Restauration, Mariès sera conseiller municipal durant 12 ans. Il travaille sur le plan d'Albi établit par Laroche et tel le Baron Haussman, créé de larges avenues, perce de nouvelles rues, assainit et modernise la ville d'Albi pratiquement restée dans sa configuration médiévale.
Il meurt à 93 ans le 1er mars 1851. Depuis, une rue piétonne d'Albi des plus fréquentée porte son nom.
Autre albigeois notable, le Contre-Amiral Henri-Paschal (Pascal), Marquis de Rochegude.
Contemporain de Lapérouse, Il fut le premier à écrire un dictionnaire franco-occitan. En septembre 1792, il est élu à la Convention avec plus de 50% de voix.
Il ne votera pas la mort de Louis XVI mais plutôt pour sa détention et son bannissement.
Il mourut à 92 ans le 16 mars 1834. A sa mort, il légua son hôtel particulier, ses terres et son impressionnante bibliothèque de 20 000 volumes à la ville d'Albi.
Sa tombe est anonyme et sans fioriture. Pas de croix, pas de fleur, pas de sculpture ou d’épitaphe...
Seules deux lettres enlacées semblent avoir été gravées sur sa pierre tombale...
Une sépulture qui me touche plus particulièrement, est celle du Comte Charles Antoine de Toulouse-Lautrec Montfa.
Il est le propriétaire de l'Hôtel du Bosc situé juste en face du cimetière, où le 24 novembre 1864 naîtra son neveu préféré, le futur peintre Henri de Toulouse-Lautrec.
Il sera toujours proche du célèbre l'artiste qui toute sa vie, lui rendra visite à Albi. C'est à Albi que vers 4 - 5 ans, Lautrec sensé dormir, crayonne sur les murs de sa chambre avec des charbons pris dans la cheminée. Comme tous les
hommes de la famille, Charles peint et dessine, nul doute qu'aidé par son ami le peintre Princeteau, il soutiendra son neveu dès ses premiers balbutiements en dessin et en peinture.
Charles qui n'aura pas d'enfant, meurt à 77 ans le 04 novembre 1917.
Il y a tant d'autres personnalités locales, Lacaze, Préfet du Tarn qui établira la préfecture à Albi, les ancêtres du cinéaste Louis Malle, Marc Schoelcher, frère de celui qui abolira l'esclavage en France... que l'on a prit l'habitude d'appeler ce cimetière le "Petit Père Lachaise albigeois".
La Société Savante des Arts et Belles Lettres du Tarn qui a entrepris il a y a quelques années de restaurer, d'entretenir selon ses moyens le cimetière pour le sauver, a édité un super livre de recherches sur ce cimetière, son histoire et surtout sur ses occupants:
"Nos bons aïeux... Dictionnaire des albigeois reposant au cimetière de l’hôpital d'Albi"; Un recueil anecdotes, de généalogie remarquable, une vraie mine pour tout savoir sur ce cimetière fascienant. 370 Pages - 38€
En vente sur place aux Archives Départementales du Tarn - Avenue de la Verrerie 81000 ALBI
L'association de Sauvegarde du Patrimoine d'Albi "Albi-Patrimoine"(ex. Association du Vieil-Alby) propose une visite du vieux cimetière de l'hôpital.
Samedi 3 novembre à 14h30 l'association Albi patrimoine organise la visite traditionnelle du vieux cimetière de l'Hôpital.
Cette visite guidée nous permettra, après une présentation générale de l'histoire du cimetière, de découvrir les principales tombes où reposent des personnalités qui ont fait l'histoire d'Albi au XIXe siècle. Nous inaugurerons, à cette occasion, une plaque sur l'histoire de ce cimetière.
Le rendez-vous se fera sur le parking en bordure du mur du cimetière, face à l'entrée du parking du Bondidou.
Attention! l'entrée du cimetière a changé de place: elle se situe près de la maison du directeur de l'Hôpital,en face de la salle du Pigné.
Partons maintenant dans les Monts de Lacaune, vers un cimetière qui m'est très familier celui de l'église Saint Jean del Frech près de Lacaze.
Je me suis beaucoup amusé autour de cette belle et étrange église avec mes camarades lorsque j'étais au Petit Séminaire Saint Louis de Pratlong à quelques kilomètres de là.
Nous y venions en promenade les mercredis après-midi ou durant la nuit pour la messe de Noël, frissons garantis...
Une croix presque discoïdale que j'ai toujours trouvé très belle, protège le site qui est également gardé par un cercle fait d'arbres et de buis.
Le jour touche à sa fin. La lumière rasante du soleil couchant d'automne donne à la nature une couleur mordorée que j'aime beaucoup. Le paysage est de toute beauté.
Le vent souffle avec une certaine violence qui ajoute à l'atmosphère prenante et presque un peu pesante des lieux.
L'église est l'un des plus anciens lieux de culte tarnais. Bâtie à l'emplacement d'un lieu de culte Celte christianisé, elle est mentionnée dès 972.
Les bâtiments semblent avoir été repris entre le 12ème et le 13ème siècle.
Des cathares y furent enterrés ce qui entraîna une désacralisation temporaire du cimetière.
Entre 1381 et 1386, on la retrouve dans les comptes des annales payées au diocèse de Castres sous le nom de "Ecclesia Sancti Joannis de Frigidi", l'église Saint Jean du Froid, del frech en occitan.
En 1778, on créé un porche qui relie la tour de guet crénelée à l'église.
L'église fut fermée au culte par l'évêque constitutionnel d'Albi, Jean-Joachim Gausserand le 2 août 1792, (le même qui voulait détruire le Jubé de la cathédrale...)
Un état des édifices daté du 23 pluviose de l'an X (vendredi 12 février 1802) dit que l'église est un bâtiment "en mauvais état; il a besoin d'être vitré à neuf et le couvert d'être réparé en entier".
Comme Camalières, le hameau voisin, n'a pas encore d'église, elle servira de lieu de culte jusqu'en 1819.
Au 17ème siècle, l'albigeois (le Tarn), compte près de 20 000 protestants répartis essentiellement dans sa partie Sud, entre Réalmont, Roquecourbe, Montredon-Labessonnié, Vabre, Castelnau de Brassac, Brassac, Viane, Lacaune, Anglès, Labastide Rouairoux, Mazamet, Castres, Puylaurens...
Après la révocation de l'édit de Nantes en 1685, les religionnaires, pourchassés, n'ont d'autres choix que de se cacher et de se rassembler dans des endroits secrets lorsqu'ils veulent célébrer leur culte ou écouter le prêche d'un pasteur. C'est ce qu'on appelle "Les Assemblées du Déserts", parfois appelés "Synodes du Désert".
Le vendredi 22 avril 1689, une Assemblée se tient autour du prédicant Corbière de la Sicarié dans le cimetière de Saint Jean del Frech.
Isolé, il n'y a aucune habitation autour de l'église qui est à 800 mètres d'altitude au milieu des bois.
Soudain, une foule de 1200 personnes envahit le cimetière.
Une troupe armée financée par le Baron de Férrières et par la Marquise de Lacaze, surgit et massacre un à un tous protestants présents.
Le pasteur et trois de ses compagnons arrivent à s'enfuir et parviennent à gagner Berlats près Castelnau de Brassac où les Dragons les rattrapent et les tuent...
Désormais, chaque année au lieu-dit la Pierre Plantée, le quatrième dimanche du mois d'août, un rassemblement commémore ce terrible massacre.
Quant à Saint Jean del Frech, l'Evêque de Castres Honoré de Quiqueran de Beaujeu fit ériger une grande Croix au centre du cimetière lors de sa visite pastorale le mardi 9 août 1712. Construction expiatoire ?
Là-bas, on dit toujours, que les jours de grands vents, si on fait attention, on entend encore les cris de huguenots et le jour de tournage, le vent se faisait même violent...
Ps. Hormis les clichés fait par la caméra vidéo, il y a peu de photos dans cet article en illustration du cimetière de Saint Jean del Frech. Toutes les photos que j'ai pris avec mon téléphone ont disparu de celui-ci, de l'Icloud, et du dossier de sauvegarde automatique qui normalement conserve tous les clichés même ceux effacés... J'ai la photos pris avant, celles après mais pas celles du cimetière...
Découvrez également mon reportage sur les tombes mystérieuses des cimetières de Sainte Juliane et de Notre Dame de Ruffis:
Cimetières mystérieux du Tarn - www.dedans-dehors
Parce qu'en ce début de novembre, nous allons fêter la Toussaint, j'avais envie de partager avec vous deux sites qui m'intriguent. Deux cimetières du Tarn assez mystérieux pour m'intéresser et...
http://www.dedans-dehors.com/2017/10/cimetieres-mysterieux-du-tarn.html
Vidéo et photos (sauf mention contraire) : Justin BONNET
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Musée du Protestantisme de la Réforme à la laïcité de Ferrières (Tarn)
Pourquoi les hommes ne regardent-ils point sans une émotion profonde toutes les ruines, même les plus humbles ? Sans doute elles sont pour eux une image du malheur dont le poids est senti par eux si diversement. Les cimetières font penser à la mort, un village abandonné fait songer aux peines de la vie ; la mort est un malheur prévu, les peines de la vie sont infinies. L'infini n'est-il pas le secret des grandes mélancolies?
Passionné par le patrimoine, l'Histoire et surtout les personnes qui en font parti, mon grand plaisir c'est découvrir encore et encore et partager mes découvertes....
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